« Contestation et affirmation du principe national : mouvements internationalistes et la crise des démocraties dans l’Europe de l’entre-deux-guerres » : différence entre les versions

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=== Les autres formes d’internationalisme : pacifisme, espérantisme et action syndicale transnationale (1900 – 1918) ===
=== Les autres formes d’internationalisme : pacifisme, espérantisme et action syndicale transnationale (1900 – 1918) ===
Il existe d’autres mouvements qui ne font pas exclusivement partie du mouvement ouvrier, des mouvement internationaux comme le mouvement espérantiste qui a pour ambition de créer une langue artificielle afin d’aller au delà des particularités nationales. Le mouvement espérantiste s’organise en 1908 et constitue une véritable organisation transnationale.
Si le mouvement ouvrier constitue sans doute la forme la plus structurée de l’internationalisme à la veille de la Première Guerre mondiale, il n’en est pas l’unique incarnation. D’autres courants, moins directement liés à la question sociale, participent également à cette dynamique transnationale, en cherchant à dépasser les cadres nationaux à travers des projets culturels, linguistiques ou pacifistes. Leur diversité témoigne de la richesse des tentatives visant, sous différentes formes, à transcender les frontières dans une Europe profondément marquée par la montée des nationalismes rivaux.
 
Il ne faut pas sous-estimer l’effort engagé, les bolchevique au début de la Révolution ont pensés imposer l’esperanto dans l’Union Soviétique. C’est un effort de transgresser les frontières aussi fort que les efforts des armées de défendre les frontières.
Parmi ces mouvements, l’espérantisme occupe une place originale. Né de l’initiative de Ludwik Lejzer Zamenhof, un médecin polonais de Białystok, l’espéranto vise à créer une langue artificielle neutre, pensée comme un vecteur de communication universelle, au-delà des clivages ethniques, linguistiques et nationaux. Fondée sur une grammaire simplifiée et un vocabulaire international, cette langue entend abolir les malentendus culturels et faciliter la compréhension mutuelle entre les peuples. Dès 1908, le mouvement espérantiste s’organise de manière structurée avec la création de l’Association universelle d’espéranto (Universala Esperanto-Asocio), devenant l’une des premières organisations véritablement transnationales, rassemblant des adhérents issus de contextes politiques et culturels extrêmement variés.
 
Le pacifisme n’est pas seulement international mais lutte contre les menaces de guerre bien visible. Déjà au début du XXème siècle, on parle ouvertement et notamment dans les États major d’une grande guerre qui se prépare.
L’espérantisme ne se limite pas à un simple projet linguistique : il véhicule une véritable utopie pacifiste et internationaliste, dans laquelle la communication interculturelle est perçue comme un rempart contre les conflits et un outil de fraternisation mondiale. La portée de ce projet est telle qu’au moment des débuts de la Révolution bolchévique, certains dirigeants soviétiques envisagent même d’adopter l’espéranto comme langue véhiculaire interne à l’Union soviétique naissante, considérant qu’une telle langue pourrait symboliser la rupture radicale avec l’ordre impérial ancien et faciliter l’unification des peuples socialistes d’origines diverses. L’ambition était immense : instaurer un outil de dépassement des appartenances nationales aussi puissant que les armées l’étaient pour en défendre les frontières.
 
Le mouvement ouvrier va répandre cette idée et essayer pendant la première guerre mondiale de faire continuer la collaboration internationale autour du pacifisme notamment en Suisse afin de proposer des solutions afin de sortir de la guerre. Les conférences pacifistes sont tenues en Suisse à l’initiation du parti socialiste suisse en septembre 1915 à Zimmerwald et en avril 1916 à Kienthal.
Parallèlement à ces initiatives culturelles, le pacifisme se développe comme une autre forme essentielle de l’internationalisme. Contrairement à l’espérantisme, il s’inscrit dans une réponse directe aux tensions militaires croissantes de l’époque. Dès les premières années du XXᵉ siècle, les chancelleries européennes et les états-majors anticipent la possibilité d’une conflagration majeure, alimentée par les alliances militaires rigides, les rivalités impérialistes et la course aux armements. Face à cette perspective inquiétante, des mouvements pacifistes transnationaux cherchent à mobiliser les opinions publiques contre la logique de guerre.
 
Il y a aussi l’idée d’organiser les syndicats, souvent des syndicats régionaux, mais qui ont des organisations nationales, elles pourraient opérer pour exercer une influence sur l’opinion publique dans leur pays. Les ouvriers gardent la consigne d’être dans la situation des opprimés, des exploités et des massacrés lors des batailles.
Le pacifisme ne constitue pas un bloc homogène ; il regroupe des intellectuels, des associations laïques, religieuses, féminines, mais aussi des fractions du mouvement ouvrier qui considèrent que la guerre impérialiste est un massacre absurde des classes populaires au service des intérêts des États dominants. L’approche pacifiste vise à défendre à la fois une éthique humaniste et une analyse politique des rapports de force internationaux.
 
Les Conférences syndicales internationales sont tenues à Leeds 1916 et Berne 1917. Cela était très important pour la paix. Ceux qui travaillent à la réorganisation de l’après guerre ont une longue expérience de coopération non-gouvernementale devenant après la guerre une collaboration gouvernementale.
Au cœur de la Première Guerre mondiale, certains cercles pacifistes tentent de maintenir un dialogue international malgré l’effondrement de la solidarité socialiste officielle. La Suisse, restée neutre durant le conflit, devient un espace privilégié pour ces initiatives. Deux conférences emblématiques s’y tiennent : la conférence de Zimmerwald en septembre 1915, et celle de Kienthal en avril 1916. Ces rassemblements réunissent des socialistes dissidents, des syndicalistes et des pacifistes qui cherchent des alternatives politiques à la poursuite du conflit. Lénine lui-même participe à Zimmerwald, où il expose ses thèses sur la nécessité de transformer la guerre impérialiste en guerre révolutionnaire contre les classes dirigeantes.
 
En parallèle, le mouvement syndical poursuit également ses efforts de coordination internationale malgré la guerre. Les syndicats, souvent organisés d’abord à l’échelle locale ou régionale, se sont progressivement dotés de structures nationales capables de peser sur les débats politiques internes. Durant le conflit, ils tentent de jouer un rôle actif en faveur de la paix et de la défense des travailleurs confrontés aux sacrifices imposés par la mobilisation générale et l’économie de guerre. Des conférences syndicales internationales sont ainsi organisées à Leeds en 1916 et à Berne en 1917. Ces rencontres visent à maintenir des échanges entre représentants syndicaux des différents pays belligérants, à formuler des propositions en vue de la paix et à préparer les futurs cadres de coopération après-guerre.
 
Ces expériences de coopération non-gouvernementale, patiemment construites pendant la guerre, ne demeureront pas sans lendemain. Nombre de leurs participants joueront, après 1918, un rôle important dans la création de nouvelles formes de gouvernance internationale, qu’il s’agisse de la Société des Nations ou des premières institutions de coopération syndicale et économique transnationale.
 
En marge du mouvement ouvrier institutionnalisé, ces divers courants internationalistes — qu’ils soient culturels, pacifistes ou syndicaux — illustrent la vitalité d’une pluralité d’expériences transnationales cherchant à dépasser l’emprise des États-nations à la veille et pendant la Première Guerre mondiale. Chacun à leur manière, ils traduisent une aspiration commune à inscrire les solidarités humaines, les revendications sociales et les projets de paix dans des cadres dépassant les logiques de souveraineté nationale et de confrontation étatique. Si ces initiatives n’ont pas suffi à enrayer l’escalade guerrière de 1914-1918, elles ont cependant préparé les bases d’une réflexion internationale qui inspirera, après la guerre, de nouvelles architectures de gouvernance mondiale, des tentatives de paix durable et la poursuite des échanges transnationaux entre les sociétés civiles.


= L’échec de la diffusion internationale de la Révolution russe : 1917 – 1920 =
= L’échec de la diffusion internationale de la Révolution russe : 1917 – 1920 =

Version du 2 juin 2025 à 17:24

L’histoire de l’Europe moderne est profondément marquée par la tension entre l’affirmation des souverainetés nationales et l’émergence de dynamiques internationalistes. Ce double mouvement constitue l’un des fils conducteurs majeurs des XIXᵉ et XXᵉ siècles européens, où s’affrontent, se chevauchent et parfois se combinent des logiques d’enracinement national et des principes de portée universelle. Pour en saisir toute la complexité, il convient d’abord de souligner que ces deux dynamiques ne s’excluent pas mécaniquement, mais peuvent s’entrelacer et se recombiner selon les contextes politiques, religieux et culturels.

L'exemple des structures religieuses européennes illustre cette dialectique de manière particulièrement éclairante. Le catholicisme, par essence universaliste et centralisé autour de l’autorité pontificale, constitue un modèle de gouvernement spirituel qui transcende les frontières étatiques et linguistiques. L’Église catholique se pense et se présente comme un gouvernement universel, régissant les croyants au-delà des États et des particularismes locaux. En revanche, d’autres confessions chrétiennes ont développé des formes organisationnelles étroitement liées aux structures politiques nationales. L’Église luthérienne, historiquement indissociable des monarchies germaniques et scandinaves, s’est souvent constituée dans le cadre d’un lien étroit entre le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel, ancrant la foi dans des contextes politiques déterminés. À l’Est de l’Europe, le christianisme orthodoxe s’est organisé selon le principe des Églises nationales, chaque Église autocéphale épousant les contours des frontières politiques et des identités linguistiques de son peuple — une logique qui persiste encore aujourd’hui.

Cette pluralité des formes d’organisation religieuse montre que le rapport entre foi, identité nationale et internationalisme est loin d’être homogène. Ainsi, un même individu ou un même mouvement peut articuler des logiques nationalistes et internationalistes sans contradiction apparente. Le cas de la Pologne en fournit un exemple caractéristique. Nation souvent privée d’indépendance politique, soumise aux empires voisins — notamment la Russie tsariste —, la Pologne a forgé un puissant patriotisme nourri à la fois de résistance nationale et de ferveur religieuse catholique. Dans cette configuration, le catholicisme fonctionne à la fois comme ressource spirituelle transnationale et comme marqueur identitaire de la lutte nationale, démontrant ainsi l’imbrication des dimensions internationalistes et nationalistes.

Loin de se réduire à une opposition simple entre deux pôles, la relation entre nationalisme et internationalisme produit, dans chaque contexte, des configurations spécifiques, des « constellations » historiques singulières. Ces articulations mouvantes se retrouvent tout au long du XIXᵉ siècle et trouvent une intensité particulière dans la période de l’entre-deux-guerres en Europe, où la crise des démocraties libérales, la montée des totalitarismes, les mouvements révolutionnaires et les recompositions géopolitiques amplifient ces tensions et recombinaisons.

C’est à l’étude de ces dynamiques complexes — entre affirmation du principe national et contestations internationalistes — que cet article est consacré.

L’internationalisme dans le mouvement ouvrier : 1848 – 1914

Au cours de la seconde moitié du XIXᵉ siècle, le mouvement ouvrier européen devient l’un des vecteurs les plus structurés et les plus explicites de l’internationalisme politique. Dès ses origines, cette mouvance articule une ambition révolutionnaire qui dépasse le cadre des États-nations, en posant la condition ouvrière comme une réalité universelle transcendant les frontières et les identités nationales. Deux figures majeures symbolisent cette dynamique initiale : Karl Marx et Mikhaïl Bakounine, dont les trajectoires parallèles illustrent à la fois la richesse et les tensions internes de l’internationalisme ouvrier naissant.

Karl Marx s’impose comme le principal théoricien du capitalisme industriel et de l’émancipation de la classe ouvrière. Son apport fondamental ne réside pas uniquement dans son action militante ou son engagement dans les révolutions de 1848 — bien qu’il y participe activement, notamment à Cologne et à Paris, allant jusqu’à prendre part aux barricades — mais avant tout dans l’élaboration d’une analyse systématique et critique du fonctionnement du capitalisme moderne. En 1848, Marx, en collaboration avec Friedrich Engels, publie Le Manifeste du Parti communiste, un texte qui deviendra rapidement la matrice doctrinale de l’ensemble des mouvements socialistes et communistes ultérieurs. Le Manifeste ne se limite pas à un simple appel à la révolte ; il propose une lecture structurée de l’histoire à travers le prisme des rapports de classes, identifiant la lutte entre bourgeoisie et prolétariat comme le moteur central de l’évolution sociale moderne.

L’un des éléments les plus novateurs et caractéristiques du Manifeste réside dans son refus des cadres nationaux traditionnels. Marx et Engels y énoncent de manière explicite que « les prolétaires n’ont pas de patrie ». Ce postulat pose d’emblée les fondations d’un internationalisme ouvrier radical : la condition du travailleur industriel, exploitée par le capital, se retrouve dans tous les pays où s’étend le capitalisme industriel. Ainsi, l’appartenance nationale est considérée comme secondaire, voire comme une construction artificielle destinée à diviser la classe ouvrière mondiale. Ce positionnement est d’autant plus audacieux que, dans les faits, l’industrialisation est encore largement inégale à l’époque : seules certaines régions d’Europe occidentale — le Royaume-Uni, la Belgique, une partie de l’Allemagne et du nord de la France — connaissent une concentration industrielle significative. Le reste de l’Europe demeure dominé par des structures agraires ou artisanales. Autrement dit, la perspective de Marx est d’une grande anticipation, formulant une vision précoce de ce que l’on désignera plus tard comme la mondialisation des économies.

Mikhaïl Bakounine, de son côté, incarne une autre branche de cet internationalisme ouvrier : celle de l’anarchisme révolutionnaire. Également acteur des révolutions de 1848, Bakounine conteste la centralisation politique et économique prônée par les marxistes. Son projet repose sur une émancipation immédiate des structures étatiques et sur la construction de fédérations autonomes de travailleurs, débarrassées de toute forme d’autorité centralisée. Là où Marx envisage une dictature temporaire du prolétariat en vue de l'édification d'une société sans classes, Bakounine défend une suppression immédiate de l'État, perçu comme un instrument systématique d'oppression, quelle que soit sa coloration politique. Si les deux hommes partagent un même diagnostic quant à l’exploitation capitaliste et à la nécessité d'une révolution sociale, leurs divergences sur les moyens et les structures du pouvoir post-révolutionnaire vont profondément diviser les courants socialistes.

L’affirmation de l’internationalisme ouvrier va progressivement se structurer à travers la création d’organisations supranationales. La Première Internationale, ou Association Internationale des Travailleurs (AIT), fondée en 1864 à Londres, constitue la première tentative concrète d’unir les différents courants ouvriers européens sous une même bannière. Cette organisation réunit marxistes, anarchistes, syndicalistes, et diverses mouvances socialistes réformistes. Cependant, les tensions entre les partisans de Marx et ceux de Bakounine aboutiront à l’éclatement de l’AIT dès les années 1870. Malgré cet échec, l’idée d’une solidarité de classe transnationale reste profondément ancrée dans la culture politique ouvrière.

Au-delà des débats doctrinaux, le principe de solidarité internationale devient une pratique militante concrète. Des grèves internationales sont soutenues par des mouvements ouvriers d’autres pays ; des exilés politiques trouvent refuge et soutien dans des réseaux transfrontaliers ; des congrès internationaux organisent les discussions stratégiques. Cette dynamique s’intensifie encore avec la fondation de la Deuxième Internationale en 1889, qui se présente comme un organe de coordination des partis socialistes et sociaux-démocrates européens. La Deuxième Internationale renforce l’idée que la classe ouvrière constitue un sujet politique global, dont les intérêts fondamentaux dépassent les divisions géographiques.

L’internationalisme ouvrier entre 1848 et 1914 se fonde ainsi sur plusieurs piliers idéologiques et pratiques : une analyse commune de l’exploitation capitaliste, une vision transnationale de la solidarité de classe, et l’élaboration de structures organisationnelles visant à dépasser les souverainetés étatiques. Pourtant, ce projet internationaliste va être confronté à une épreuve décisive en 1914, lorsque le déclenchement de la Première Guerre mondiale mettra à nu les contradictions entre les solidarités de classe proclamées et les loyautés nationales mobilisées. Mais avant ce tournant dramatique, l’internationalisme ouvrier avait posé les bases d’une contestation transnationale du capitalisme industriel et des États-nations modernes.

La Première Internationale : genèse et tensions de l’internationalisme ouvrier (1864 – 1876)

La création de la Première Internationale, officiellement appelée Association internationale des travailleurs (AIT), constitue une étape majeure dans l’histoire de l’internationalisme ouvrier. Fondée en 1864 à Londres à l’initiative de militants socialistes français et britanniques, l’AIT vise à donner une expression organisationnelle concrète à la solidarité internationale des travailleurs, jusque-là encore largement théorique. Dès l’origine, cette organisation porte l’ambition de dépasser les frontières nationales pour structurer la lutte ouvrière à une échelle supranationale. Le comité provisoire de l’AIT reflète cette diversité géographique, rassemblant 21 Anglais, 10 Allemands, 9 Français, 6 Italiens, 2 Polonais et 2 Suisses. La composition hétérogène de cette première instance illustre le caractère déjà transnational des réseaux ouvriers engagés dans la contestation sociale de l’époque.

L’idée même d’« Internationale » se fonde sur un principe d’internationalité organisationnelle, réunissant des associations locales, régionales et nationales sous une structure fédérative qui transcende les souverainetés étatiques. Il ne s’agit pas d’une organisation de masse au sens moderne du terme : à cette période, les syndicats, partis et associations ouvrières demeurent encore des groupuscules minoritaires, souvent marginaux et tolérés avec difficulté selon les régimes politiques en place. Cependant, ces noyaux militants se considèrent comme les avant-gardes d’une force historique appelée à transformer en profondeur l’ordre mondial, convaincus que les contradictions du capitalisme industriel conduiront inéluctablement à une révolution sociale planétaire.

Les foyers principaux de ce mouvement internationaliste se trouvent en France et en Grande-Bretagne, deux pays qui offrent un environnement relativement plus permissif à l’expression socialiste et communiste. En Grande-Bretagne, le syndicalisme ouvrier est déjà structuré autour des Trade Unions, tandis qu’en France, les débats socialistes s’enracinent dans la tradition révolutionnaire héritée de 1789, 1830 et 1848. L’influence marxiste commence à y imprégner progressivement les cercles ouvriers les plus politisés, bien que d’autres courants — républicains radicaux, proudhoniens, blanquistes — coexistent dans un paysage intellectuel foisonnant.

Au sein de cette Première Internationale, la confrontation des doctrines ne tarde pas à se cristalliser autour de deux figures centrales : Karl Marx et Mikhaïl Bakounine. Le marxisme s’articule autour de l’idée d’un déterminisme historique selon lequel l’évolution du capitalisme industriel conduit inévitablement à l’exacerbation des antagonismes sociaux. De cette exacerbation naîtrait une révolution mondiale débouchant sur une dictature transitoire du prolétariat, chargée de liquider les anciennes structures bourgeoises pour instaurer progressivement une société sans classes. Cette perspective historique confère aux militants marxistes une conception centralisée et planifiée de la révolution, dans laquelle l’État révolutionnaire joue un rôle stratégique décisif.

En revanche, Mikhaïl Bakounine, bientôt à la tête de la tendance anarchiste au sein de l’AIT, conteste cette centralisation jugée dangereuse et oppressive. Préférant le terme de libertaire à celui d’anarchiste, Bakounine et ses partisans défendent l’idée d’une autogestion immédiate par les travailleurs eux-mêmes, sans passage par une phase de pouvoir d’État, fût-il au nom du prolétariat. Cette approche trouve un écho particulier parmi les artisans et les petits producteurs, qui composent encore largement le monde ouvrier européen à cette époque. Nombre d’entre eux, fiers de leur autonomie professionnelle et de leur savoir-faire manuel, redoutent toute forme de tutelle centralisée, qu’elle émane de l’État bourgeois ou du parti révolutionnaire.

Le cas du Jura suisse illustre cette dynamique de manière exemplaire. Dans cette région d’horlogerie, des collectifs ouvriers accueillent Bakounine et ses idées libertaires avec enthousiasme. Loin des grands centres industriels, ces travailleurs qualifiés expriment une volonté forte d’organisation autonome, indépendante des structures étatiques et des hiérarchies centralisées. Ce « socialisme des petits producteurs » constitue un contrepoint direct aux visions marxistes qui, elles, s’appuient sur le développement massif de la grande industrie et de la classe ouvrière urbaine prolétarisée.

Les tensions doctrinales entre marxistes et bakouniniens atteignent rapidement un point de rupture. Les débats théoriques dégénèrent en affrontements organisationnels qui paralysent l’AIT dans les années 1870. Marx parvient à évincer les anarchistes lors du congrès de La Haye en 1872, conduisant Bakounine à être exclu. Mais cet épisode provoque l’éclatement définitif de la Première Internationale, incapable de maintenir l’unité entre des conceptions révolutionnaires aussi antagonistes. En 1876, l’AIT est officiellement dissoute.

Malgré cet échec institutionnel, la Première Internationale a posé les premiers jalons d’une structuration transnationale des luttes ouvrières. Elle a permis la confrontation directe de doctrines socialistes rivales et a contribué à internationaliser les débats sur la stratégie révolutionnaire. Les clivages apparus dans cette période inaugural continueront de structurer durablement le paysage des gauches européennes au XXᵉ siècle, tandis que l’idée même d’« Internationale » demeurera une référence symbolique majeure pour les générations de militants à venir.

La Seconde Internationale : l’âge d’or et la fracture de l’internationalisme ouvrier (1889 – 1923)

La création de la Seconde Internationale marque une nouvelle phase dans l’institutionnalisation de l’internationalisme ouvrier. Fondée en 1889, centenaire de la Révolution française, à Paris, elle rassemble les principales forces socialistes, sociales-démocrates et syndicales européennes, dans un contexte profondément transformé par rapport aux décennies précédentes. L’expérience tumultueuse de la Première Internationale avait montré les limites des tentatives précoces d’unification doctrinale entre marxistes et anarchistes. Désormais, c’est principalement sous l’impulsion des partis socialistes réformistes et sociaux-démocrates que s’organise cette nouvelle Internationale, qui parvient à fédérer un mouvement ouvrier désormais massifié et institutionnellement mieux structuré.

À la différence du milieu du XIXᵉ siècle, l’Europe de la fin des années 1880 est dominée par de grands États-nations consolidés. L’unification allemande réalisée en 1871, sous la direction de la Prusse, a fait émerger un nouvel acteur industriel et politique central en Europe. L’Allemagne devient, en quelques décennies, l’une des principales puissances industrielles du continent, dotée d’une classe ouvrière nombreuse et d’un parti social-démocrate (le SPD) particulièrement puissant. Fondé en 1875, le SPD parvient à s’imposer, malgré les lois antisocialistes de Bismarck, comme le plus grand parti ouvrier du monde à la veille de la Première Guerre mondiale. Son influence intellectuelle et organisationnelle devient rapidement prépondérante au sein de la Seconde Internationale.

Le développement du capitalisme industriel et l’extension des droits politiques aux classes populaires (par l’élargissement progressif du suffrage) permettent également aux partis ouvriers d’accéder aux parlements nationaux. Désormais, les socialistes ne sont plus uniquement des forces de contestation extérieure, mais deviennent progressivement des acteurs du jeu politique institutionnel. Ce déplacement stratégique ouvre des débats internes majeurs au sein du mouvement ouvrier sur la conciliation entre la participation aux institutions bourgeoises et la poursuite des objectifs révolutionnaires. Le réformisme parlementaire, incarné notamment par les sociaux-démocrates allemands et une partie des socialistes français, s’oppose à des courants plus radicaux qui dénoncent une dérive opportuniste.

Au-delà des partis politiques, la Seconde Internationale s’appuie également sur une nébuleuse syndicale, associative et intellectuelle diversifiée qui constitue l’arrière-plan social et culturel de cet internationalisme. La mobilisation ne se limite plus à des minorités militantes : la classe ouvrière organisée atteint désormais une masse critique, aussi bien en Europe qu’aux États-Unis, où les luttes ouvrières sont particulièrement virulentes. Des villes comme Chicago ou les bassins industriels de Pennsylvanie deviennent des foyers importants de grèves et de révoltes ouvrières.

C’est d’ailleurs à Chicago que se déroule en 1886 l’épisode tragique de Haymarket Square. Alors que des ouvriers en grève pour la limitation de la journée de travail à huit heures manifestent, une explosion et une répression policière sanglante marquent cette journée. Cet événement devient un symbole international du martyre ouvrier. En hommage à ces victimes américaines, la Seconde Internationale adopte en 1889 la date du 1ᵉʳ mai comme Journée internationale des travailleurs, consacrant ainsi une dimension universelle à la lutte pour les droits sociaux. Cette adoption du 1ᵉʳ mai illustre parfaitement la logique internationaliste de la Seconde Internationale, qui fait d’un massacre local aux États-Unis un symbole fédérateur pour le mouvement ouvrier mondial.

Pendant près d’un quart de siècle, la Seconde Internationale apparaît comme une structure relativement stable de coordination internationale. Des congrès réguliers permettent aux différentes délégations nationales de débattre des stratégies, des revendications et des principes à défendre face au capitalisme mondial. Toutefois, derrière cette unité apparente, de profondes divergences idéologiques et stratégiques subsistent, notamment autour des questions de guerre, de colonialisme et de coopération avec les États bourgeois.

L’épreuve décisive survient en 1914 avec le déclenchement de la Première Guerre mondiale. Malgré des engagements antérieurs à refuser tout soutien aux guerres impérialistes, les partis socialistes des principales puissances européennes s’alignent finalement derrière leurs gouvernements respectifs. En Allemagne, en France, en Autriche comme au Royaume-Uni, les partis ouvriers participent à l’« Union sacrée », soutenant l’effort de guerre national et abandonnant de facto le principe de solidarité de classe internationale. L’appel à la défense de la patrie prend le pas sur l’internationalisme, envoyant les travailleurs des différentes nations combattre et s’entretuer dans les tranchées d’une guerre mondiale qui écrase l’idéal proclamé de fraternité prolétarienne.

L’échec de la Seconde Internationale face à la guerre révèle les limites profondes de l’internationalisme ouvrier de la Belle Époque, incapable de résister aux puissances centrifuges des nationalismes et des logiques étatiques. Si l’organisation continue d’exister formellement jusqu’en 1923, son rôle devient marginal dans l’après-guerre. Entre-temps, la révolution bolchevique de 1917 en Russie inaugure une nouvelle phase du mouvement ouvrier international avec la naissance de la Troisième Internationale (ou Komintern), qui va tenter de reconstruire un internationalisme communiste désormais rivé sur l’exemple soviétique.

La Seconde Internationale apparaît ainsi comme l’apogée, mais aussi comme la première grande crise du projet internationaliste ouvrier : à la fois moment de massification des organisations ouvrières à l’échelle mondiale et démonstration tragique de leur incapacité à dépasser la puissance des États-nations lorsque l’épreuve de la guerre s’impose.

Les autres formes d’internationalisme : pacifisme, espérantisme et action syndicale transnationale (1900 – 1918)

Si le mouvement ouvrier constitue sans doute la forme la plus structurée de l’internationalisme à la veille de la Première Guerre mondiale, il n’en est pas l’unique incarnation. D’autres courants, moins directement liés à la question sociale, participent également à cette dynamique transnationale, en cherchant à dépasser les cadres nationaux à travers des projets culturels, linguistiques ou pacifistes. Leur diversité témoigne de la richesse des tentatives visant, sous différentes formes, à transcender les frontières dans une Europe profondément marquée par la montée des nationalismes rivaux.

Parmi ces mouvements, l’espérantisme occupe une place originale. Né de l’initiative de Ludwik Lejzer Zamenhof, un médecin polonais de Białystok, l’espéranto vise à créer une langue artificielle neutre, pensée comme un vecteur de communication universelle, au-delà des clivages ethniques, linguistiques et nationaux. Fondée sur une grammaire simplifiée et un vocabulaire international, cette langue entend abolir les malentendus culturels et faciliter la compréhension mutuelle entre les peuples. Dès 1908, le mouvement espérantiste s’organise de manière structurée avec la création de l’Association universelle d’espéranto (Universala Esperanto-Asocio), devenant l’une des premières organisations véritablement transnationales, rassemblant des adhérents issus de contextes politiques et culturels extrêmement variés.

L’espérantisme ne se limite pas à un simple projet linguistique : il véhicule une véritable utopie pacifiste et internationaliste, dans laquelle la communication interculturelle est perçue comme un rempart contre les conflits et un outil de fraternisation mondiale. La portée de ce projet est telle qu’au moment des débuts de la Révolution bolchévique, certains dirigeants soviétiques envisagent même d’adopter l’espéranto comme langue véhiculaire interne à l’Union soviétique naissante, considérant qu’une telle langue pourrait symboliser la rupture radicale avec l’ordre impérial ancien et faciliter l’unification des peuples socialistes d’origines diverses. L’ambition était immense : instaurer un outil de dépassement des appartenances nationales aussi puissant que les armées l’étaient pour en défendre les frontières.

Parallèlement à ces initiatives culturelles, le pacifisme se développe comme une autre forme essentielle de l’internationalisme. Contrairement à l’espérantisme, il s’inscrit dans une réponse directe aux tensions militaires croissantes de l’époque. Dès les premières années du XXᵉ siècle, les chancelleries européennes et les états-majors anticipent la possibilité d’une conflagration majeure, alimentée par les alliances militaires rigides, les rivalités impérialistes et la course aux armements. Face à cette perspective inquiétante, des mouvements pacifistes transnationaux cherchent à mobiliser les opinions publiques contre la logique de guerre.

Le pacifisme ne constitue pas un bloc homogène ; il regroupe des intellectuels, des associations laïques, religieuses, féminines, mais aussi des fractions du mouvement ouvrier qui considèrent que la guerre impérialiste est un massacre absurde des classes populaires au service des intérêts des États dominants. L’approche pacifiste vise à défendre à la fois une éthique humaniste et une analyse politique des rapports de force internationaux.

Au cœur de la Première Guerre mondiale, certains cercles pacifistes tentent de maintenir un dialogue international malgré l’effondrement de la solidarité socialiste officielle. La Suisse, restée neutre durant le conflit, devient un espace privilégié pour ces initiatives. Deux conférences emblématiques s’y tiennent : la conférence de Zimmerwald en septembre 1915, et celle de Kienthal en avril 1916. Ces rassemblements réunissent des socialistes dissidents, des syndicalistes et des pacifistes qui cherchent des alternatives politiques à la poursuite du conflit. Lénine lui-même participe à Zimmerwald, où il expose ses thèses sur la nécessité de transformer la guerre impérialiste en guerre révolutionnaire contre les classes dirigeantes.

En parallèle, le mouvement syndical poursuit également ses efforts de coordination internationale malgré la guerre. Les syndicats, souvent organisés d’abord à l’échelle locale ou régionale, se sont progressivement dotés de structures nationales capables de peser sur les débats politiques internes. Durant le conflit, ils tentent de jouer un rôle actif en faveur de la paix et de la défense des travailleurs confrontés aux sacrifices imposés par la mobilisation générale et l’économie de guerre. Des conférences syndicales internationales sont ainsi organisées à Leeds en 1916 et à Berne en 1917. Ces rencontres visent à maintenir des échanges entre représentants syndicaux des différents pays belligérants, à formuler des propositions en vue de la paix et à préparer les futurs cadres de coopération après-guerre.

Ces expériences de coopération non-gouvernementale, patiemment construites pendant la guerre, ne demeureront pas sans lendemain. Nombre de leurs participants joueront, après 1918, un rôle important dans la création de nouvelles formes de gouvernance internationale, qu’il s’agisse de la Société des Nations ou des premières institutions de coopération syndicale et économique transnationale.

En marge du mouvement ouvrier institutionnalisé, ces divers courants internationalistes — qu’ils soient culturels, pacifistes ou syndicaux — illustrent la vitalité d’une pluralité d’expériences transnationales cherchant à dépasser l’emprise des États-nations à la veille et pendant la Première Guerre mondiale. Chacun à leur manière, ils traduisent une aspiration commune à inscrire les solidarités humaines, les revendications sociales et les projets de paix dans des cadres dépassant les logiques de souveraineté nationale et de confrontation étatique. Si ces initiatives n’ont pas suffi à enrayer l’escalade guerrière de 1914-1918, elles ont cependant préparé les bases d’une réflexion internationale qui inspirera, après la guerre, de nouvelles architectures de gouvernance mondiale, des tentatives de paix durable et la poursuite des échanges transnationaux entre les sociétés civiles.

L’échec de la diffusion internationale de la Révolution russe : 1917 – 1920

Timbre soviétique commémorant la révolution d'Octobre.

La Révolution est d’abord une révolution libérale bourgeoise afin de créer un régime constitutionnel.

En 1917 est créé le régime communiste en Russie sous Lénine. D’abord les révolutionnaires russes mais pas seulement, ils sont aussi autrichiens, etc., essaient de créer le socialisme alors que les théoriciens du parti argumentent que la Russie n’est pas adaptée à ce projet de révolution socialiste.

Il y une occasion avec la situation révolutionnaire, ce qui est souhaité est la révolution mondiale utilisant la Russie comme signal. L’espoir est d’exporter la révolution vers l’Allemagne qui va être défaite. C’est un pays extrêmement industrialisé avec une classe ouvrière bien consciente de sa force. Les révolutionnaires bolcheviques font en sorte d’encourager leurs camarades ailleurs.

À la fin de la guerre, dans les derniers mois de 1917 et notamment en 1918 et 1919, après l’armistice, il y a des tensions sociales partout dans les pays avec des grandes grèves, des mutineries, des ouvriers de l’industrie d’armement, des gens qui sentent la dégradation de leur standards de vie, l’inflation dévalue les salaires. Il y abeaucoup de frustrations et d’amertume aussi à cause des pertes humaines très grandes.

Cette vague de revendications sociales, de grèves générales et de grèves politiques s’étend de l‘Irlande à la Grande-Bretagne, en Allemagne et en Suisse, même la Suède qui n’a pas participée à la guerre connait ce phénomène de revendications populaires. L’idée d’une conspiration mondiale des communistes est une mythologie parce qu’ils n’ont pas la capacité de le faire même si le rêve y est. Les révolutions sociales sont vues comme des préparations aux révolutions politiques.

The Communist International published a theoretical magazine in a variety of European languages from 1919 to 1943.

Lénine est ses camarades vont former une Troisième Internationale que l’on appelle aussi Kominterm afin de réaliser avec les forces nationales de la gauche extrême dans les différents pays ce projet de la Révolution Mondiale.

Cette Internationale va exister jusqu’à la deuxième guerre mondiale. Staline décide la terminer parce qu’il veut donner une autre image de l’Union Soviétique ne voulant plus être une révolution mondiale mais une nationaliste. Cette Internationale n’arrive pas à réaliser l’idée face aux mouvements nationaux mais il y un centre avec une logistique qui est l’Union Soviétique. Ensuite, les partis communistes vont se créer notamment en France, en Angleterre, aux États-Unis mais encore en Suisse.

Il y a également des raisons internes pour chaque pays expliquant pourquoi le mouvement ouvrier se partage en deux mouvements : courant marxiste-léniniste et courant social-démocrate. La question est de soutenir l’effort de guerre ou d’aller contre l’effort de guerre des mouvements nationaux.

Pour les communistes, il faut terminer cette guerre, terminer l’Union Sacrée et ouvertement lutter contre les gouvernements pour la paix mais aussi pour des réformes et des changements sociaux.

Veut-on qu’une organisation remplace une autre organisation ou comme les sociales-démocrates, souhaite t-on changer par la voie de l’intérieur est la grande question. Il y a des forces intérieures très fortes mais dans une communication absolument internationale. Les informations circulent, la communication marche très bien, il y a le télégraphe, la presse, ce n‘est pas impossible de faire une révolution mondiale.

Comme les communistes occupent l’Internationale, l’Internationale Ouvrière Socialiste est créée pour regrouper les partis qui avaient refusés d’adhérer au réseau communiste. Dans un même pays il y a les tensions du mouvement ouvrier mondial.

Kun Béla Csepelen beszédet tart a munkásoknak.

Un journaliste hongrois, Béla Kun était impliqué dans la social-démocratie autrichienne-hongroise. Comme beaucoup de gens de son époque, Béla Kun était impliqué politiquement. Il se radicalise durant la guerre critiquant la politique de Vienne de déclencher la guerre contre les serbes et au côté de l’Allemagne. C’est dans un certain sens une perspective nationalise : la Hongrie n’a rien à chercher dans cette guerre tout comme la classe ouvrière.

Dans un certain sens, il réussit à mobiliser des membres de l’ancien mouvement socialiste mais il a aussi des membres de l’ancienne armée impériale qui ont l’habitude de faire la guerre. Ce mouvement de frustrations sociales était dangereux et sensible parce que les gens qui retournaient au pays avaient fait la guerre pendant quatre ans.

Il y a l’éclatement de la guerre, Vienne devient la capitale de la petite Autriche ne s’occupant plus de l’ancien empire et les nouveaux États sont dans une situation de faiblesse.Béla Kun dirige une république dans le cadre de Conseils.

Les conseils sont des groupements élus directement ou gouvernés par les concernés, c’est-à-dire soit des ouvriers ou de soldats. C’est une sorte de légitimation directe par le peuple avec l’idée d’une démocratie directe et l’idée de gens qui représentent directement les intérêts soit le point de vue et les positions des classes.

C’est l’idée d’une action directe, d’une démocratie qui vient par en bas. Les cadres du gouvernement ou des partis communistes se pensent comme les avant-gardes de la classe ouvrière ou des prolétariats mais c’est aussi un moyen d’implanter les communistes dans les organes gouvernants.

Dans le cas de la Révolution Russe, la révolution bourgeoise est une bonne chose pour Lénine mais pas assez moderne, c’est pourquoi des conseils vont être mis en place pour pouvoir y infiltrer des membres du parti. Ainsi, si on ne peut dominer les organes, on se positionne sur une politique révolutionnaire d’avant-garde, le putsch est une action légitimée par la volonté du peuple. C’est un élément de délégitimisation du système libérale républicain. Il faut dans un certain sens une voie beaucoup plus directe entre volonté du peuple et décision politique ouvrant la porte à des régimes dictatoriaux. Toutefois, il y avait beaucoup d’espoirs pour une gouvernance directe.

En 1919, la Russie est très largement occupée par sa propre guerre civile. L’installation d’un régime communiste à Budapest est interprétée par tous les protagonistes de l’époque comme une menace : les alliés occidentaux donnent le feu vert à l’armée roumaine afin de mater la révolution hongroise. Dans l’imaginaire de l’histoire nationale hongroise, les voisins ont maté une tentative d’indépendance nationale. Lorsque la Hongrie va être transformée en république socialiste, cela n’a pas aidé à consolider l’amitié entre les peuples.

Dans l’Empire Austro-Hongrois il y avait l’empereur et le roi de Hongrie, il n’y a pas de famille royale hongroise, c’est pourquoi va être installée une régence.

Miklós Horthy entrant à Budapest à la tête de l'Armée Nationale, le 16 novembre 1919.

Horthy fut ministre de la guerre pendant la répression du mouvement de Béla Kun. Il va laisser intact la façade des institutions mais c’est l’installation d’un régime autoritaire qui ensuite se radicalise. Il va travailler avec Hitler non pas pour faire une politique nazie mais désire mettre en place une politique d’extension afin de réaliser la Grande Hongrie que le traité du Trianon a empêché de créer.

C’est pourquoi Horthy participe à la seconde guerre mondiale afin d’accomplir le projet de la constitution de la Grande Hongrie et non pour des idées nécessairement fasciste. Toutefois, Horthy va être renversé par les extrémistes qui vont mettre en place la persécution des juifs hongrois. Les hongrois ont le triste record d’éliminer leur population juive lorsque tout est pratiquement terminé. Il y a l’essaie de créer un régime communiste et ensuite vient la création d’un régime autoritaire agressif.

Ces différents mouvements créées une crainte très répandue des Rouges que le communisme mondial prépare partout la révolution. Il faut remarquer que la répression de Horthy est beaucoup plus meurtrière que l’action de Béla Kun.

La montée et le déclin des régimes parlementaires en Europe : 1918 – 1939

les régimes démocratiques 1919 - 1933

En bleu apparaissent de régimes parlementaires qui renvoient à l’ordre interne mais pas nécessairement des démocraties conformes à l’État. La forme de la monarchie un peu comme aujourd’hui est alors très répandue.

En Hongrie s’installe un régime autoritaire durable, pour le reste il y a un phénomène notamment en Allemagne donnant naissance à la République de Weimar. En Autriche va être mis en place une république tout comme en Turquie avec l’installation d’une république présidentielle avec Ata Türck.

Tous les belligérants qui ont perdu la guerre changent de régime politique. Les gagnants n’ont évidemment pas de raison de changer de régime politique, cela n’empêche qu’il peut y avoir des grèves ou encore des insurrections communistes comme le mouvement spartakiste en Allemagne.

Nationalisme et mouvements autoritaires

Les régimes autoritaire 1933 - 1939.

Il faut noter que la Tchécoslovaquie reste la dernière des démocraties créées après la première guerre mondiale. Le modèle du fascisme italien de Mussolini puis celui de Hitler en 1933 sont admirés pour gouverner efficacement sur la base d’élites technocratiques et militaires.

Beaucoup d’historiens se sont posé la question de savoir si la droite réagit à la gauche. Seulement, les différents régimes politiques s’observent d’une manière extrêmement intense, c’est plutôt une interdépendance qu’un jeu de pillage.

Annexes

  • Angaut, Jean-Christophe. Bakounine, Jeune Hégélien: La Philosophie Et Son Dehors. Lyon: ENS Édition, 2007.
  • Angaut, Jean-Christophe, and Mikhail Aleksandrovich Bakunin. La Liberté Des Peuples: Bakounine Et Les Révolutions De 1848. Lyon: Atelier De Création Libertaire, 2009.
  • Angaut, Jean-Christophe. "Le Conflit Marx-Bakounine Dans L'internationale : Une Confrontation Des Pratiques Politiques." Actuel Marx 41.1 (2007): 112.
  • Marx, Karl, Friedrich Engels, Emile Bottigelli, and Gérard Raulet. Manifeste Du Parti Communiste. Paris: Flammarion, 1998.

Références